spacer.png, 0 kB
spacer.png, 0 kB
Mounir Fatmi, Plasticien

 
Altruiste et ambitieux, ces deux adjectifs se prêtent à la fois au travail et à la personne de Mounir Fatmi. Artiste plasticien d'origine marocaine, âgé de 32 ans, il s'intéresse de très près à la notion de rapport à l'autre. Accueilli en résidence au centre culturel le Chaplin à Mantes la Jolie, il dirige actuellement un projet en lien avec le quartier du Val Fourré : Ovalprojet, "diffuser ailleurs pour être vu ici". Le point de départ de cette aventure était pour lui de choisir un lieu précis et d'en faire "le centre du monde". Installé depuis quelques mois dans le quartier, c'est avec bonheur qu'il partage le quotidien de ce microcosme où se côtoient, chaque jour, une centaine de nationalités différentes.

"Pour moi, Mantes la Jolie n'est pas une ville, c'est un projet (…)"

L'enjeu de ce travail est une réflexion sur le pouvoir de l'image qui se concrétiserait par un "portrait" vidéo du quartier, diffusé non pas sur les ondes françaises mais via la parabole. "L'idée d'Ovalprojet est de diffuser les images que produisent les immigrés sur les chaînes de leur pays d'origine parce qu'ils n'ont plus confiance en la télévision française. Ils se sentent trahis". Mounir Fatmi tient à dresser un portrait réel de ce quartier en tenant compte, bien entendu, des difficultés et de la violence qui y règnent, sans annihiler pour autant des notions comme l'échange, le partage ou la religion. Outre sa dimension artistique, il s'agit en quelque sorte d'une entreprise de reconstruction identitaire du qaraïte. "Pour moi, Mantes la Jolie n'est pas une ville, c'est un projet. Si je dis que c'est une ville, on a envie de la détruire cr, architecturalement, elle n'est pas faite pour des humains. Si je dis que c'est un projet, on a envie de construire quelque chose et c'est un peu plus positif."
Mounir Fatmi partage le reste de son temps entre Paris et Tanger. Lorsqu'il quitte Mantes la Jolie et change d'horizon, il ne change pas pour autant d'objectif. L'autre reste au centre de ses préoccupations. Depuis 1996, il a monté une série de travaux dont certains se poursuivent encore aujourd'hui, autour de ce questionnement : "Comment établir le contact avec l'autre, qui est-il et que suis-je pour lui ?". Il se demande plus précisément, s'il existe une image propre à l'immigré.
L'autre fait à la fois partie du processus et de l'œuvre. Ainsi chaque instant passé auprès de Mounir Fatmi peut être un moment de création artistique. Lorsqu'il voyage, en train ou en avion, il ne manque jamais de faire découvrir son travail à la personne qui se trouve à ses côtés. Puis, si celle-ci accepte d'être photographiée, elle devient partie intégrante de son œuvre. "J'ai commencé à me dire que mon public était la personne qui était à côté de moi et que, par conséquent, il fallait que je fasse quelque chose pour la rencontrer. J'ai donc aujourd'hui toute une série de portraits de personnes qui se sont retrouvées, à un moment ou à un autre de ma vie, à côté de moi". Mounir Fatmi a un profond respect de l'autre et de sa culture, son travail mêle sans contradiction aucune l'artistique et le social. Et si malheureusement il n'a pas de solution à offrir, il tend la main et il ne tient qu'à l'autre de la saisir.

- Angélique Lagarde, "Mounir Fatmi, plasticien", Projections, n°2, Paris

 

 

spacer.png, 0 kB
spacer.png, 0 kB

© Mounir FATMI
spacer.png, 0 kB